Le processus d’acceptation/deuil d’un licenciement
Le processus d’acceptation/deuil d’un licenciement
Ce processus compte plusieurs phases et peut se manifester de différentes manières. La rapidité et l’intensité avec lesquelles le travailleur licencié parcourt ce processus dépendent de différents facteurs, e.a. :
- le licenciement était-il attendu / inattendu ?
- quelle est la situation financière de l’intéressé ?
- combien d’années de service avait-il ?
- est-ce le premier licenciement ?
- l’intéressé a-t-il un réseau social étendu ?
- a-t-il déjà été souvent confronté à des coups durs ?
- le travailleur licencié s’identifiait-il fortement à son travail ?
- le licenciement a-t-il été communiqué correctement et avec respect ?
- etc.
Grosso modo, on distingue trois phases :
- la phase de notification du licenciement
- la phase de perte
- la phase d’adaptation et d’intégration
1.Notification du licenciement
Quand un travailleur est informé qu’il perd son emploi, il y a plusieurs réactions possibles : colère, tristesse, mais aussi angoisse, voire désespoir.
Parfois, nous voyons qu’un travailleur ne s’en rend pas vraiment compte ou réagit de manière apathique. Le message n’a pas été assimilé car il est trop pénible à encaisser au moment même. Dans ce cas, il accusera le coup plus tard. Le début du processus d’acceptation est donc différé.
Si le travailleur n’était plus satisfait de son emploi depuis quelque temps, le licenciement peut le soulager, le délivrer. Dans ce cas, il était déjà mentalement prêt et son processus avait déjà débuté au moment de la notification du licenciement.
2. La perte – Le processus d’acceptation
La phase de perte est la phase de ‘déprime’. Elle est souvent vécue intensément, et l’équilibre personnel est perturbé. Cela peut se traduire à différents niveaux :
- Emotionnel: on est hyper-sensible et très susceptible dans des situations qui, normalement, ne se prêtent pas à de telles réactions. Par exemple, un article dans un quotidien peut suffire pour éclater en larmes. Les réactions d’une personne ne sont pas proportionnelles aux événements. On est très susceptible. Pour les proches, la personne se pique pour un rien et est de mauvaise humeur.
- Cognitif : le “film du licenciement” se déroule à nouveau. Ces flashbacks font revivre les événements, ce qui est utile pour les surmonter, mais peut aussi entraîner des problèmes de concentration. La perte de l’emploi et les événements y afférents entraînent souvent une image de soi négative. On ne parvient plus à se juger soi-même objectivement, on commence à douter, etc.
- Comportemental : vu l’insomnie, les problèmes de concentration, l’état d’esprit négatif, on n’a plus d’énergie et on ne parvient plus à s’organiser efficacement. On ne parvient pas à prendre l’initiative, à prendre le taureau par les cornes, à s’organiser.
- Physique : parfois, la résistance physique diminue. Le corps ne résiste plus à certaines infections, qui n’avaient pas posé problème jusqu’alors. De nombreuses personnes souffrent de troubles psychosomatiques. Certaines fonctions vitales sont affectées. On dort beaucoup ou, au contraire, très peu. Il en va de même pour les habitudes alimentaires : on n’a plus d’appétit ou, au contraire, on devient boulimique, comme pour se consoler.
Les réactions ci-dessus se situent dans un contexte de ‘perte’. Il y a non seulement la sensation de perte de l’emploi, mais aussi la baisse des revenus et perte de structure. L’organisation quotidienne disparaît, les contacts sociaux au bureau aussi, et dans la vie pratique des éléments disparaissent : p.ex. la voiture de société, le portable et le GSM doivent être rendus.
La durée de cette phase varie de quelques jours à plusieurs semaines. Le partenaire et les enfants peuvent eux aussi montrer des symptômes de perte car eux aussi subissent le coup.
3. Adaptation et intégration
L’être humain a du ressort, de l’énergie pour s’adapter, avec plus ou moins d’aide, à toute nouvelle situation et il intègre le nouveau contexte dans son quotidien. Tout doucement, on remonte la pente. On est moins susceptible, le repos nocturne revient petit à petit, etc. L’image de soi est liée à d’autres rôles que le rôle professionnel seul. On se rend compte que ce dernier n’est qu’un rôle, en plus de celui de père/mère, partenaire, membre d’une association, … On se met également à réfléchir à des rôles futurs, à des alternatives, et on se fait une idée concrète des vacances d’emploi que l’on consulte.
Tout doucement, on reconstitue son cadre temporel, on s’organise à nouveau et on trouve des solutions à des problèmes pratiques (achat d’une voiture d’occasion, etc.). L’équilibre personnel est restauré et on est à nouveau axé sur le futur.
Les phases ci-dessus font partie d’un processus normal après un licenciement. Chaque personne réagit différemment, mais le fait d’être conscient qu’il s’agit de réactions “normales” à une situation “anormale” donne confiance. Discutez de votre situation personnelle avec votre consultant. Il peut vous donner de précieux conseils pour que votre processus se déroule dans les meilleures conditions.
Faire son deuil, c’est ramer avec 2 rames
Ce serait naïf de penser que tout le monde parcourt juste ce processus en suivant la courbe. Faire son deuil, c’est ramer avec 2 rames.
Stroeb en Schut parlent d’un modèle à double processus. Par moments, l’attention se porte sur la perte, et à d’autres moments, sur le fait de poursuivre sa vie, de renouer les fils. Cela nous ramène aux rames.
L’une des rames est orientée sur la perte. Elle symbolise le face à face avec la perte, le fait de repenser à la façon dont les adieux se sont déroulés, de se rappeler de la personne que l’on a perdue, d’en parler, de se languir, de ressentir le manque. L’autre rame est orientée sur la guérison. Elle symbolise le fait de continuer à avancer, de réorienter sa vie après la perte que l’on a subie… Revenons au moment de la perte. Vous montez sur une barque qui tangue, vous cherchez le meilleur endroit pour vous assoir, attrapez maladroitement ces grandes rames, et vous êtes déjà content que la barque ne se soit pas retournée. Voulez-vous vraiment aller de l’avant? Ou bien êtes-vous tellement secoué que vous ne savez pas ? Peut-être qu’au fond de vous, vous voulez mourir, et vous vous demandez quel est le sens de votre vie.
Toute personne qui est confrontée à une perte significative se retrouve en eaux troubles. Ou au moins dans des eaux inexplorées. Vos pieds ne sont plus sur la terre ferme, et cela demande déjà beaucoup de force et d’énergie de simplement maintenir la barque en équilibre. En réalité, l’un des côtés demande parfois plus d’attention que l’autre. Rien n’empêche de ne ramer que d’un côté pendant un certain temps, et de tourner en rond. Vous êtes le rameur, même si votre barque peut soudainement prendre une direction différente de celle que vous avez choisie. Mais, si vous ramez pendant longtemps avec une seule rame, vous n’avancerez pas vraiment.
‘Il s’agit de trouver votre propre rythme pour éviter de vous noyer dans les émotions, mais sans les réprimer. Ce qui compte, c’est de prendre du temps pour la peine, et de prendre du temps pour s’en éloigner et s’en distraire.’
Cette métaphore vaut pour toutes les pertes : un décès, une rupture, une perte d’emploi, traverser une maladie grave ou une dépression, une maladie chronique, etc…
Que pouvez-vous faire de ça en tant que personne en deuil ? Ce que je veux surtout souligner, c’est qu’il s’agit de votre perte, et de votre propre manière d’y faire face. Les modèles ne sont pas là pour prescrire comment vous devez le faire. Au contraire ! J’espère que cela fera écho en vous, vous permettra d’y voir plus clair, et qu’au moins vous serez rassuré sur la manière dont vous menez votre barque.